Bye bye Mister Johnson
En ce début septembre, Boris Johnson a été remplacé par Liz Truss au poste de premier ministre. A ce sujet, Phil Evans, britannique, français, bourguignon et fier de l’être, membre de la maison de l’Europe, s’est livré à une interview à sa manière faite d’humour et de franc-parler.
Quels sont vos sentiments à l’occasion de ce remplacement ?
De mon point de vue c’est la fin d’une époque, particulièrement triste et même dangereuse pour la politique britannique. En effet Boris Johnson a déplacé la politique britannique vers la droite, a fait d’une approche populiste la norme et a affaibli le principe de «séparation des pouvoirs», l’une des garanties d’une démocratie qui fonctionne et la Royaume – Uni en est un bon exemple
Que pensez-vous de Johnson lui-même ?
Dès l’enfance il a fait preuve d’une personnalité narcissique et centrée sur lui-même. Des vidéos de famille le montrent avec de longs cheveux blonds désordonnés. Il voulait être « roi du monde ». Plus tard, à Eton, l’école privée la plus connue du Royaume-Uni, le membre senior du personnel qui le connaissait le mieux lui reprochait d’estimer que les règles ne s’appliquaient pas à lui et ne pas comprendre pourquoi un tel comportement le rendait inapte à être nommé « house master ».
A l’université d’Oxford. Il s’est investi dans « Oxford Union », une société étudiante très importante pour ceux qui souhaitent entamer une carrière politique. Il en a été élu président à la
deuxième tentative ; mais son mandat n’a pas été apprécié car il n’a pas pris le poste au sérieux. Pour lui, c’était simplement un moyen d’arriver à ses fins.
Sa carrière politique a-t-elle rompu avec ces foucades de jeunesse ?
Devenu maire de Londres il a eu des succès avec l’aide d’une bonne équipe ! Premier ministre il a été réticent à faire le travail acharné nécessaire. Il a préféré faire ce qui est opportun plutôt que juste, concentré sur ses succès personnels plutôt que sur ce qui est bon pour le pays. Ces défauts, couplés à une extraordinaire capacité à mentir lorsqu’il est confronté à des problèmes politiques ou même lorsqu’il a fait quelque chose de mal, le rendent très dangereux.
A vous entendre il a mis en péril la démocratie britannique
Oui, par exemple en enfreignant la loi sur les « les règles de confinement » dues au covid . En mentant à ce sujet, il a rendu le grand public beaucoup plus cynique l’égard des politiciens. Il a renforcé l’opinion selon laquelle les politiciens ne se concentrent pas sur le bien public mais plutôt sur leur propre intérêt.
Il a également sapé la démocratie britannique par les actions du gouvernement qu’il a dirigé. Citons un exemple. L’année dernière, le gouvernement a tenté de mettre fin à la session parlementaire en instaurant une pause dans les débats suivie d’une nouvelle session parlementaire. C’est normal en règle générale, mais cette fois ce ne l’était pas ! En effet la fin de séance parlementaire n’a pas été anticipée et la pause entre celle-ci et la suivante a été beaucoup plus longue que la normale. La vraie raison de cette action ? Il s’agissait d’éviter l’examen par le Parlement du soidisant «Brexit Bill» ! Un appel a été interjeté devant la Cour suprême par divers groupes politiques et la Cour suprême a jugé à l’unanimité que l’action du gouvernement était illégale. Le Parlement a continué à siéger et le projet de loi en question a été examiné. Le résultat, cependant, a été que le gouvernement cherche maintenant à réduire le pouvoir de la Cour suprême dans ces domaines.
Que diriez-vous en conclusion ?
Pour moi, Boris Johnson n’a ni philosophie politique, ni « vision personnelle » de ce que signifie être le Premier ministre de l’une des principales démocraties du monde, ni croyance politique ; ce qu’on appelle « Johnsonisme ». Pour lui, être premier ministre n’est qu’une manière de réussir personnellement. Le moteur de son action consiste à Intervenir pour se protéger en cas de difficulté. Rien d’autre. Bref, Boris Johnson est un homme politique dangereux et je considère sa démission avec plaisir. Risquons-nous de voir se poursuivre la même chose avec ses successeurs ? That‘s the question !
Phil Evans