Lettre n° 17 - Courrier du mois n°2-

BERTRAND BADIE – L’ART DE LA PAIX

S’élargir – ce que L’Europe peut offrir – la paix et l’état de droit
L’art de la paix s’apprend, se construit et nous devons, chacun, personnellement, y collaborer ardemment en montrant que la relation, l’échange, y compris dans le dissensus, la justice et le pardon, sont plus que tout supérieurs à l’art de la guerre et de la force qui au cours de ces 80 dernières années n’a jamais remporté de victoire.
À l’élargissement géographique nous devons opposer une autre vision de l’élargissement : élargir les frontières à la liberté dans l’interdépendance ; le droit à l’égalité de traitement ; élargir la possibilité de la gratuité, ressource vitale de la fraternité; élargir le droit au respect de toute personne humaine, du vivant et de la nature, construire la confiance, élargir notre respect à toute personne humaine, élargir les contre-pouvoirs face aux tendances illibérales ; élargir, protéger et défendre l’Etat de Droit et l’indépendance de la Justice. C’est cela que nous devons offrir au monde.

Philippe Mayaud

Témoignage

Salam. Que la paix soit avec vous. Mais, dans le monde actuel, de quelle paix parle-t-on, et surtout, comment l’atteindre ? C’est ce que Bertrand Badie, professeur émérite à Sciences Po Paris et politiste spécialiste des relations internationales, est venu nous enseigner vendredi 21 mars 2025, dans un amphithéâtre de l’ENSAM bondé. Chacun, chacune, était venu entendre parler le sage ; chacun, chacune, en est reparti avec de l’espoir et surtout, des « recettes », des outils de construction de la Paix.
Bertrand Badie a déroulé comment nos sociétés occidentales se sont construites autour de la notion de souveraineté, elle-même régie par la guerre comme outil fonctionnel de gains territoriaux et économiques. Dans ce cadre, la paix a toujours été conçue comme l’absence de guerre, dans une vision transactionnelle.

Nos sociétés sont en cela une exception, et d’autres cultures préfèrent à la non-guerre l’intégration ou le bonheur comme définition de la Paix – dans la lignée d’Aristote, ou de Saint-Augustin.
Toutefois, la dynamique tend à changer : les guerres sont coûteuses, et les « faibles » les gagnent. Dès lors, pourquoi ne pas envisager la Paix ?
Dans une approche holistique, le Professeur explique qu’une paix pensée permet de réaliser plus de bénéfices qu’une guerre réalisée. Ainsi, peace is being free from fear (pas de paix dans la peur), il faut donc travailler à construire la confiance seule antidote de la peur. La Paix passe par la satisfaction des besoins fondamentaux de l’humanité, par la connaissance de l’Autre et de son fonctionnement, par la représentation de chacun dans le système institutionnel, par le réaménagement planétaire, par l’éducation.
La Paix ne relève en aucun cas de la non-guerre, mais bien d’une construction, qui doit être réalisée par chacun, chacune, ensemble. Le regard s’éloigne alors des acteurs traditionnels des relations internationales pour aller rencontrer les individus qui font l’empathie sociale internationale, les agences multilatérales de l’ONU ou les ONG. Voire même, pourquoi pas, le Pape François !
Car ce qui porte la Paix, c’est surtout, la rencontre, la réconciliation, l’émergence d’une Vérité, qui « apai(x)se », dans un collectif des peuples, unis.
Voilà ce que nous avons appris, à Cluny.

Elizabeth Bélier – Sciences Po Paris