Lettre n° 14- Avril 2024

Migrations : L’Union Européenne change de cap

Source : Sauvons l’Europe https://www.sauvonsleurope.eu/limmigration-leurope-la-gauche/

NOUVEAU PACTE MIGRATOIRE DE L’U.E., RÉACTIONS…
« La réforme respecte pleinement nos valeurs », a déclaré l’eurodéputée française Fabienne Keller (Renew Europe, centristes et libéraux).

« Pas une seule vie ne sera sauvée par la décision d’aujourd’hui (…). Cet accord est un échec historique et un hommage aux partis de droite européens », ont regretté plus de 15 ONG de secours en mer, dont Sea – Watch et SOS Humanity.

« Félicitations à l’UE et à la Commission pour être parvenues à un accord politique sur le pacte européen sur la migration et l’asile», Haut Commissaire de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) et l’agence de l’ONU pour les réfugiés (HCR). Le Haut Commissaire pour les réfugiés le qualifiant « d’étape très positive ».

L’eurodéputé français Damien Carême (Verts) a dénoncé un pacte migratoire «qui fait honte aux plus belles valeurs de l’Europe». « On ressort avec un texte qui est pire que la situation actuelle. […] On va financer des murs, des barbelés, des systèmes de protection partout en Europe ».


FAITS DIVERS :
Rishi Sunak, né le 12 mai 1980 à Southampton (Hampshire, Angleterre), chef du parti conserva- teur, est le premier hindou et «non-blanc»
à être Premier ministre du Royaume-Uni
(25 octobre 2022).
– 20 mars 2024, au Pays de Galles (3 millions d’habitants), Vaughan Gething, Zambien d’origine, avocat, devient le Premier ministre noir africain d’une nation européenne.
Hadja Lahbib est ministre des Affaires étran- gères, des Affaires européennes et du Commerce extérieur de Belgique ; elle est née en Belgique de parents kabyles algériens, de religion musulmane.

Dossier

2015 – 2023 : la montée en pression

2015, année charnière : un million de Syriens migrent vers l’Union européenne. Mme Merkel leur a ouvert la porte sans contrôle et sans prévenir les autres pays de l’UE. Ajoutons-y les réfugiés venus d’Afghanistan, d’Irak, de Libye. 1 800 000 migrants en un an. C’était beaucoup !
Année après année, le nombre de migrants a décollé : avant 2015 : 150 000 par an; en 2022, 600 000 d’Ukrainiens accueillis sans problème dans un cadre de protection temporaire ; en 2023, 380 000 arrivées irrégulières, selon Frontex ; chiffre le plus élevé depuis 2016, en augmentation de 17 % par rapport à 2022. Quant aux demandes d’asile, elles pourraient s’élever à plus d’un million d’ici la fin 2023, selon l’Agence de l’UE pour l’asile (EUAA). L’UE comptait au 1er janvier 2023, 5 % de citoyens non européens sur 440 millions d’habitants.

2023 : L’immigration devient la première préoccupation des Européens (Eurobaromètre d’octobre 2023). Pour 28 % des personnes interrogées, c’est le « premier problème auquel l’Europe doit faire face », devant l’inflation (20 % des sondés) et loin devant la situation économique (14 %).

Les pays de l’Union sont très divisés : le « règlement de Dublin » se révèle inefficace. La solidarité entre États est un échec, ils peinent à mettre en place des politiques communes. Les partis d’extrême droite en profitent. Plusieurs gouvernements préfèrent agir seuls, parfois de manière répressive vis-à-vis des migrants et demandeurs d’asile extraeuropéens. Les migrants venus d’Afrique ou du Moyen-Orient sont les plus redoutés.

Source : Sauvons l’Europe https://www.sauvonsleurope.eu/limmigration-leurope-la-gauche/

Face à ce problème :

Certains pays construisent des murs : 1700 km (Calais, barrière « anti-intrusion », Autriche-Hongrie contre la route des Balkans, Pologne contre la Biélorussie, etc.). Ces murs ne sont pas financés par Bruxelles.
La Commission sous-traite la gestion migratoire à des pays tiers :
> elle donne de l’argent : à la Turquie (2016), à la Libye (2017), à la Tunisie (2023), pour qu’ils surveillent leurs côtes et, malgré leurs abus en matière de droits humains, empêchent les migrations vers l’Europe. Par exemple, le marché – six milliards d’euros – négocié en 2016 pour le compte de l’UE par Angela Merkel avec la Turquie permettait d’empêcher les migrants de partir vers l’Europe et obligeait à reprendre les non éligibles à l’asile. En 2021, les Turcs ont obtenu une rallonge de trois milliards d’euros.
> elle promeut le transfert des demandeurs d’asile vers des pays tiers :
Janvier 2024, l’Italie innove en s’accordant avec l’Albanie pour y construire deux centres de filtrage de migrants d’une capacité de 3000 personnes ; à l’exemple du Royaume-Uni avec le Rwanda, le 5 décembre 2023. En effet, en oct. 2023 le gouvernement italien d’extrême droite avait dû réouvrir ses frontières aux travailleurs étrangers : 136 000 pour 2023 ; 151 000 pour 2024 ; 165 000 pour 2025. (Le Figaro).
Février 2024, le chef du gouvernement espagnol, et Ursula von der Leyen accompagnés du directeur de Frontex, rencontraient à Nouakchott le président de la Mauritanie, afin de signer un accord économique et surtout migratoire. En effet, ce pays accueille actuellement 150 000 réfugiés ayant fui l’insécurité régnant au Mali. Il est devenu un pays de transit pour rejoindre l’Europe, notamment vers l’Espagne.
6 mars 2024, à Bucarest le PPE. (parti du centre droit, premier en nombre de sièges au Parlement EU) promeut la candidature de Ursula von der Leyen à la présidence de la Commission et s’engage à externaliser les demandes d’asile des demandeurs d’asile dans l’UE vers des pays tiers « sûrs », sur la base du modèle rwandais conçu par le Royaume-Uni.

17 mars 2024, Ursula von der Leyen et le président Abdel Fattah al-Sissi au Caire.

17 mars 2024, Ursula von der Leyen et cinq chefs d’État européens ont signé au Caire un partenariat de 7,4 milliards d’euros, dont 200 millions d’aide à la gestion des migrations. L’Europe craint en effet que les conflits dans les territoires voisins, dans la bande de Gaza et au Soudan, viennent fragiliser un peu plus Le Caire et provoquent un afflux de migrants clandestins vers l’Europe (L’Express).

Des migrants débarquent d’un navire qui vient de traverser la Méditerranée 2015.

2023-2024 : virage à droite, un nouveau pacte migratoire

Commission, États membres et parlement s’accordent sur un nouveau pacte sur la migration et l’asile (1). Le pacte rend plus difficile l’entrée des migrants dans l’espace de l’UE :
Création de centres de filtrage fermés « à proximité des frontières extérieures » de l’UE. Les migrants en situation irrégulière y seront retenus durant au moins sept jours et trois mois au plus, afin de vérifier selon des règles uniformes leur identité et de déterminer avec assistance juridique s’ils sont éligibles au droit d’asile. Dans le cas contraire, ils seront expulsés sans entrer dans l’Union (2).
Maintien de la solidarité avec les États en première ligne (Espagne, Italie, Grèce) ; un certain nombre des réfugiés qu’ils accueillent – jusqu’à 30 000 par an – de- vront être accueillis par d’autres pays membres de l’UE. Les États qui refusent devront payer une somme de 20 000 € par demandeur d’asile rejeté. L’immigra- tion légale serait facilitée : procédure de demande de titre de séjour liée au travail ; les résidents de longue durée pourraient plus aisément se déplacer et travailler dans d’autres États membres.
Fichage des réfugiés par le pays d’arrivée : le Système d’information Schengen (SIS) a été mis à jour en mars 2023 : photographies, empreintes digitales et autres éléments biométriques pour lutter contre l’immigration irrégulière et le crime organisé. Le SIS signalera les migrants (exception faite des mineurs non-accompagnés) auxquels aura été refusé le droit de séjourner dans l’UE.

Cette réforme est saluée par L’Espagne, l’Italie, la Grèce et Malte, pays en première ligne ; rejetée par la Hongrie ; critiquée par les ONG (recul du droit d’asile).

Sources : Site Internet Public Sénat ; Atlas des migrations, Courrier Interna- tional août-sept. 2023. Le Monde. La Figaro magazine déc. 2023 ; La Croix.

Notes :
(1) déc 2023 : accord de principe entre les eurodéputés et les États membres ; fév. 2024 : les représentants des États membres donnent leur feu vert à l’accord avec le parlement ; le vote aura lieu avant les élections de juin 2024.
(2) Les ressortissants de pays pour lequel le taux de reconnaissance du statut de réfugié est inférieur à 20 % en moyenne dans l’UE, seront renvoyés plus rapidement vers leur pays d’origine ou de transit. En cas de brusque afflux de migrants, la durée de rétention pourra être allongée. Chaque État membre appliquera… à sa manière, ces règles communes. Même les familles avec enfants de moins de 12 ans sont concernées par cette procédure, qui implique une détention dans des centres situés près des frontières ou des aéroports par exemple.

Robert de Backer