Quand « Europe » apparaît pour la première fois sur une pièce de monnaie
Au début du XVIe siècle, Maximilien 1er est proclamé Empereur élu des Romains. C’est en Italie, à Trente. A cette occasion il crée une pièce de monnaie à son effigie. Pour la première fois semble-t-il, « Europe » apparaît sur une monnaie, relevant en l’occurrence du saint Empire Germanique qui regroupait alors grosso modo l’Allemagne actuelle, l’Autriche, une partie de l’Italie, la Savoie et le duché de Bourgogne qui s’étendait de Mâcon à la Frise.
En 1508, dans la cathédrale romano-gothique de Trente, en Italie, là où quarante ans plus tard se réunira le fameux concile, Maximilien 1er, roi des Romains et archiduc d’Autriche, se fait acclamer Empereur élu des Romains. Il aurait dû être couronné empereur par le pape Jules II, il fut proclamé tel par acclamation. Ce devait être Rome, ce fut Trente. Car la guerre faisait rage là-bas et Jules II, pape guerrier, plus à l’aise en armure et à cheval que sur le trône de Pierre en soutane blanche et mozetta rouge, était à la tête de ses troupes pour rétablir les Etats pontificaux. Imagine-t-on le pape François, casqué, dans un command-car, supervisant un combat de chars ? Autres temps, autres mœurs !
Maximilien devenu l’homme politique le plus puissant d’Europe a passé longtemps à se décrire et à se glorifier, témoins sa monumentale autobiographie et les gravures qui le mettent en scène. Le projet concocté avec Dürer et Altdorfer pour célébrer le « cortège triomphal de l’empereur Maximilien 1er » devait déployer deux cent gravures sur bois qui, imprimées sur parchemin, faisaient quatre-vingt-quatre mètres de long. Colossal ! On raccourcit la frise. Un de ces dessins intitulé « l’arc de triomphe » (354 cm x 298, 1512) fut tiré à plusieurs centaines d’exemplaires pour être offerts aux princes et aux villes. Dès 1509, année suivant son élection comme empereur, Maximilien crée une pièce de monnaie en argent à son effigie. Une communication astucieuse. La monnaie en or ou en argent circulait plus vite et touchait un public plus large pour diffuser l’image des puissants, leurs blasons et leurs titres que les biographies imprimées et les gravures monumentales.
Cette pièce de monnaie (voir illustration) particulièrement grande pour l’époque (diamètre : env. 60 mm) montre à l’avers Maximilien de profil à cheval et au revers quelques blasons de ses possessions. En voici la légende en français. A l’avers : Maximilien, par la grâce de Dieu empereur des Romains toujours auguste, archiduc d’Autriche. Au revers : Roi et souverain le plus puissant de nombreux pays d’Europe.
Mais que signifiait « Europe » pour Maximilien et pour les puissants seigneurs, les marchands, banquiers et artisans qui de main en main se passaient le taler à l’effigie de l’empereur du Saint Empire Romain Germanique ?
Nous tenterons de répondre dans le prochain numéro de La Lettre…
Robert De Backer

MAXIMILIANVS DEI GRA(tia) ROM(anorum) IMP(erator) SEMP(er) AVG(vstvs) ARCHIDVX AVSTRIE

PLVRIVMQ(ve) EVROPE PRO-VINCIAR (vm) REX ET PRINCEPS POTENTI-SIM(vs)
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